Pages 41 à 44
Sofia embrasse Gabriel sur les deux joues et fait un signe de la main à Grégory.
- Salut Greg !
- Salut Chérie. J’te propose pas du café, à moins que t’aies des envies de suicide.
- Non merci. Je n’ai pas trop de temps. J’ai une jument sur le point de mettre bas. Mais je suis quand même venue pour vous donner quelques infos.
- Euh, t’es gentille Sofia. Pour LUI donner quelques infos. Dit Gabriel en désignant des deux index Grégory. Je n’ai aucune envie de me retrouver une fois de plus dans une de vos embrouilles.
- Comme t’es rabat-joie Gab…Soupire Grégory.
- J’suis forestier moi, pas détective, ni flic et encore moins l’espion préféré de Brody. D’ailleurs, je me demande bien pourquoi vous vous êtes donnés rendez-vous chez moi ?
- Bon…je peux commencer. Demande Sofia.
- Vas-y, on t’écoute. Lance Grégory.
Gabriel part se chercher une tasse de café en soupirant. Il l'a sirote assis sur une chaise dont il soulève la partie avant d’un mouvement lent en se poussant des bouts des pieds pendant que Sofia parle.
- Bon. Primo, le gars. C’est un auteur de best-sellers qui est venu ici pour écrire.
- C’est qui ? Interroge Grégory.
- Simon Kane.
- Connais pas.
- Évidemment, tu lis que tes machins de modélismes. Raille Gabriel.
- Bon, ensuite ? Continue Grégory tout en faisant une grimace à son frère.
- Deuxièmement, la maison. Elle est inhabitée depuis trente ans. Et vous savez pourquoi ?
- Elle est hantée ! Déconne Grégory. Ah non, ne dis rien ! Y a un gosse qui s’est fait trucider dedans par un gars avec une tronçonneuse !
- Hé, on n’est pas à Jéopardy ! En plus, Grégory, t’es même pas drôle. Tes suppositions sont glauques… Bougonne Gabriel.
- Si on peut même plus rigoler…
- N’empêche que Greg a presque tapé dans le mille. Dit Sofia en laissant un blanc.
- Ah tu vois ! Jubile Grégory.
- Super…Je sens que ça va encore être cool. Dit tout bas Gabriel.
- Une femme a été retrouvée morte en mille neuf cent quatre-vingt et on n’a jamais su qui avait fait le coup. Depuis, le seul héritier est introuvable. Paraît qu’il serait parti à l’étranger mais personne ne sait où, et la maison est restée vide tout en étant entretenue. A l’exception de la semaine dernière où pour la première fois depuis trente ans, elle a été louée à ce Simon Kane, auteur de romans à suspens.
- Tu dis que la maison est entretenue. Par qui ?
- Un jardinier et une femme de chambre qui viennent deux fois par mois.
- Payés par qui ?
- Par virement d’un compte en Suisse. Donc autant dire qu’on ne sait pas qui les paie.
- Et eux-mêmes ne le savent pas ?
- Non. Tu sais certaines personnes se fichent totalement de connaître leur employeur. Surtout quand il te paie le double du tarif habituel. Tout le monde connaît l’histoire de cette maison dans le coin et crois-moi, il n’a pas dû être facile de trouver des gens pour y bosser.
Pendant un instant, pas un ne dit mot.
- Et c’est quoi le binz ? Demande soudain Grégory.
- Ça ne te suffit pas ? Dit Gabriel.
- Ben, jusque là c’est plutôt banal comme histoire et surtout je ne comprends pas pourquoi faut surveiller Kane.
- Moi non plus, je ne vois pas pourquoi Brody veut surveiller Kane. Dit Sofia. En revanche, l’affaire de départ n’a rien de banale…
- Pourquoi ? Des femmes assassinées, on en trouve sans arrêt. Proteste Grégory.
- Ouais, c’est vrai, ça fait partie du quotidien. Tiens, je devrais aller voir dans mon salon, s’il n’y en a pas une. Dit Gabriel en se levant et en foudroyant du regard son frère. Bon sang, Grégory, je ne te comprendrai jamais !
- Mm…sauf que là, il manquait un œil au cadavre. Dit Sofia.
- Quoi ?!!
- Le cadavre de la femme n’avait qu’un œil. L’autre avait été enlevé et aucune trace de ce dernier n’a été retrouvée dans la maison.
- Putain, c’est horrible ! Aboie Gabriel.
- Mais où est-ce qu’il est ce con d’œil ? Interroge Grégory de plus en plus intéressé.
- Personne ne l’a jamais su. Termine Sofia. Bon, les gars, je vous laisse, ma jument doit commencer à être mal à l’heure qu’il est.
Sofia saute au bas de la terrasse du chalet, court à son 4X4 et démarre en leur faisant un signe de la main.
Pages 58 à 60
Simon est dans sa chambre en caleçon et chaussettes.
- Qu’est-ce que je vais bien pouvoir me mettre ? Je n’avais pas prévu un apéro chez le baron du coin, moi. Bon, le jean noir…je vais mettre mon polo blanc. Par contre, pour les chaussures, les baskets, pas terrible. Tant pis.
Il se regarde dans le miroir en pied et juge sa tenue correcte.
Sorti de la chambre, il dévale les escaliers une main sur la rampe.
Arrivé en bas, il caresse l’aigle aux ailes déployées et un détail chez cet animal l’intrigue l’espace d’un millième de seconde sans qu’il ne sache pourquoi.
Il s’aperçoit alors qu’un de ses lacets est défait et s’agenouille pour le renouer.
Une tâche incrustée dans une aspérité du sol attire son attention. Une tâche sombre qu’il touche du doigt et soudain il repense à son cauchemar.
Et si cette tâche était du sang humain ? Toujours agenouillé, il relève la tête pour regarder le haut des escaliers quand la douleur de son œil gauche se fait à nouveau sentir.
- Ah ! Encore ! Zut.
Il remonte à l’étage à la salle de bain.
- Va falloir que je prenne rendez-vous chez un ophtalmo.
Il se dirige pour redescendre l’escalier quand la vision réapparaît. Il lâche un cri d’épouvante.
Cette fois, il y a la femme morte, le jeune garçon et une fillette blonde près d'eux.
L'apparition dure quelques secondes et se dissipe.
Simon est liquéfié. Des gouttelettes de sueurs perlent sur son front et ses mains sont glacées.
Il se précipite en bas, fonce à la cuisine, prend deux paquets, ferme la porte à clef et part en marchant très vite.
